(Grand-Bassam, 1958- )

Diplômée de l’Ecole des Beaux-Arts d’Abidjan, Mathilde Moro est l’unique figure de la peinture féminine ivoirienne au plan international. Au milieu des années 1980, elle a fortement contribué à l’affirmation des arts plastiques ivoiriens, aux côtés de ses amis du mouvement Vohou-Vohou. Sa rencontre avec ces peintres « iconoclastes » de l’époque l’a tenue éloignée des natures mortes et des codes esthétiques conventionnels. Elle lui a donné surtout une assise confortable construite autour de la question de l’« identité », thème cher aux tenants de ce mouvement.

Surnommée la prêtresse Vohou, Mathilde Moro a fait de la termitière le moteur de sa création. Elle a accordé une place de choix aux ocres, les couleurs des origines, les couleurs de la terre-mère. « Si la termitière vit, qu’elle ajoute de la terre à la terre », se plaisait-elle à rappeler à la suite des ancêtres fondateurs du pays Mossé (Burkina Faso). Depuis cette période, Mathilde Moro témoigne d’une vitalité qui la maintient au-devant de la scène. En 1987, Moro présente à Abidjan sa première exposition individuelle. Intitulée « Varig », cette exposition fait écho au crash, la même année, d’un avion de la compagnie du même nom peu après son décollage de l’aéroport d’Abidjan. La récurrence du ton noir, des couleurs froides marquées par les bleu sale, ainsi que des ocre brûlé agressifs donnent à sa peinture une atmosphère tout à la fois mélancolique, méditative et nerveuse.

En 1996, avec le critique d’art Mimi Errol et certains artistes de divers bords dont les peintres Yacouba Touré, Issa Kouyaté, Nguessan Essoh, Tiébena Dagnogo, Moro crée le groupe Daro-Daro (ce n’est pas un mouvement, mais un regroupement d’artistes désireux de mêler leurs énergies durant les workshops). Au fil des années – surtout suite à son séjour en Chine -, elle a fait évoluer considérablement son écriture : les couleurs chaudes et les tracés calligraphiques chinois disent bien cette avancée.

Henri Nkoumo, critique d’art