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Yacouba Touré

(Mankono, 1955 – Abidjan, 2002)

Diplômé de l’Ecole des Beaux-Arts d’Abidjan, figure emblématique du mouvement Vohou-Vohou, Yacouba Touré était l’un des artistes les plus prometteurs de sa génération. Au début des années 1980, il brûlait du désir de bousculer les habitudes picturales bien assises de la fin des années 60 et 70, d’installer la peinture loin des chemins communs pour qu’elle s’émancipe de l’art de chevalet.

Peintre de l’identité, peintre du terroir (et donc « terroiriste »), il a créé, avec ses amis Youssouf Bath, Nguessan Kra, Théodore Koudougnon, le Vohou-Vohou que rejoindra plus tard Mathilde Moro. Egalement connu sous le nom d’« Ecole d’Abidjan », ce mouvement est le plus important de l’histoire des arts plastiques ivoiriens et l’un des plus significatifs en Afrique au Sud du Sahara. Ses tenants portaient au plus profond d’eux les leçons de deux maîtres. Le premier est le Martiniquais Serge Hélénon. Enseignant à l’Ecole des Beaux-Arts d’Abidjan, il a effectué son propre retour aux sources en s’établissant en Afrique et en la racontant dans ses pièces. Il leur apprit à convoquer les matériaux de leur monde africain pour affirmer leur identité nègre. Le second est Jacques Yankel. Enseignant à l’Ecole des Beaux-Arts de Paris, il les a invités à demeurer fidèles à eux-mêmes, à écouter leurs pulsions africaines.

Emplis de ces enseignements, les jeunes membres du Vohou-Vohou (« n’importe quoi », dans une langue ivoirienne) ont rompu les amarres, en artistes sûrs d’eux-mêmes. Leur exploitation généreuse de matériaux locaux (pigments traditionnels, cauris, sable, toile de jute, etc.), leur art de « poubellistes » charriait une double poétique de la colère et de la liberté.
« Nous voulions opérer une rupture avec l’enseigne ment académique », soulignait Yacouba Touré, auteur du manifeste du Vohou Vohou.

En libérant très tôt sa peinture des limites du chevalet, Yacouba Touré leur a donné des formes plus expressives, en phase avec les convulsions qui agitent son monde intérieur. Ses productions lors des deux grands workshops organisés en 1996 et 1997 par le groupe Daro-Daro dont il est l’un des fondateurs en témoignent. Dès 2000, il s’est lancé dans la production d’installations dans lesquelles il convoquait sculpture sur bois, casques de métal, vis, peinture. Deux de ses importantes installations consacrées à la dénonciation des guerres sont : « Fini la récré » (montrée à la Biennale de Dakar en 2001) et « Les enfants soldats » (réalisée pour l’exposition «Une saison africaine « de Lille, France, en 2001). L’artiste envisageait de s’installer à New-York, foyer des arts, quand il a été gagné par la maladie. Il est décédé en 2002.

 

Henri Nkoumo, critique d’art

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